CENPA-315~07 |
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n 36 PRESENCE AFRICAINE Guerra, Mingas, Graça, les frères Benge, dont l'un est devenu paralysé et muet à la suite des violences subies dans les cachots. « Ce sont, pour la plupart, des fonctionnaires de l'État. M. Bento Ribeiro, qui fut pendant quelque temps le représentant des populations indigènes au « Conseil du gouvernement », fut également emprisonné, mais bientôt relâché, » Et le correspondant de La Gauche ajoute encore : « Nous voici, en fait, au début du processus qui pourrait mener à l'extermination massive — je pèse mes mots — des populations coloniales : l'intimidation systématique pur voie d'emprisonnement et de brutalités. Cela fmira-t-il aussi par la guerre coloniale? Des Portugais le souhaitent « pour en finir une fois pour toutes avec l'opposition des Africains. » Les événements avaient d'ailleurs déjà justifiés les craintes du correspondant de La Gauche. En effet, le 26 avril dernier, une foule évaluée à 100.000 personnes (colons portugais pour la plupart) massée à l'aéroport de Bêlas, aux alentours de la ville de Louanda, applaudissait le saut du premier parachutiste qui toucha le sol angolais, un certain Révérend Martins, l'aumônier qui accompagnait l'Armée de l'Air depuis Lisbonne. C'était le début des prouesses qui marquèrent l'installation de la forcu de l'Air en Angola. Puis, les bombardements, du tir sur les cibles, des exercices rvthmés par le feu des mitraillettes, enfin des attaques précises avec les bombes au « napalm » de quarante-cinq kilos, complétaient le programme, de cette démonstration militaire qualifiée par le quotidien de Louanda, () Jornal do Comcrcio de « premier Festival de la Force aérienne portugaise ». « Les opérations se déroulaient et se déroulèrent comme sur un champ militaire, écrit encore Im Hanche, les autorités ayant bien fait remarquer qu'il s'agissait là « de la forme de combat qu'elles mèneraient au cas où il faudrait mater une rébellion anticolonialiste », ou mieux encore le jour où elles décideraient d'écraser « en les devançant » les tentatives de rébellion populaire contre le colonialisme. « Agiles, athlétiques, au pas allemand — informe la presse coloniale enthousiaste, — les soldats étonnaient la population européenne. Ft plusieurs observateurs, nous dit-on, ne souhaitaient apparemment qu'une chose : (pie cela ne fût pas seulement un exercice. « D'autres manifestations de ce j;enrc furent organisée» dans les régions du centre et du sud de l'Angola : Nova Lisboa, Sa da Ban- deira, Lobito, Benguela. « Le député colonial du Mozambique à l'Assemblée nationale portugaise réclamait à son compte l'installation des forces militaires (aériennes) dans cette « province » « de la cê>te orientale ». PORTUGAL ET COLONIES D'ANGOLA ET GUINEE 37 Le soir même du 26 avril, après les démonstrations de la Force aérienne et au cours 'U\ banquet offert au sous-secrétaire d'État à l'Aéronautique portugaise, le gouverneur général de l'Angola prononça un discours dans lequel il déclara : « De nos jours la paix n'est possible (pie du moment où les F.iats disposent de forces suffisantes pour faire face aux menaces des agitateurs et des perturbateurs, inspirés généralement par le communisme, et sous des formes plus voilées. Le pays ne pourra se défendre s'il ne dispose pas d'une armature militaire. Partout où il existe un coin de terre portugaise, il faut que les troupes de terre, de mer et de l'air soient présentes et vigilantes, afin d'empêcher qu'on ne cède aux convoitises ou aux fausses idées. Ft plus encore : il faut que ces troupes soient moralement fortes pour résister aux diverses propagandes qui prétendent les miner, puisque l'on sait que l'armée est le principal obstacle à la diffusion de la propagande. Nous sommes à l'époque des tracts... dans lesquels la force militaire est considérée comme un ennemi gênant. Car, comme on s'y attendait, le tract est apparu aussi en Angola17. » Ce fut cette même décision générale de réprimer avec violence les moindres revendications des populations africaines qui fit de la colonie de Guinée le théâtre d'événements sanglants. Il n'est peut-être pas inutile de rappeler (pie le territoire de Guinée, (pii compte à peu près 600.000 habitants, partage ses frontières du nord avec le Sénégal, que la République de Guinée couvre toutes ses frontières de l'est et du sud; et qu'à l'ouest ses côtes sont baignées par l'Atlantique. La colonie de Guinée est un des cas typiques de morcellements coloniaux réalisés sans l'avis des populations locales. De part et d'autre de la frontière l'on retrouve des populations pariant la même langue, des ensembles appartenant au même groupe ethnique (Fulas, Mandings, Manjocas), etc. Ainsi l'on voit souvent des familles dont une partie se trouve dans la colonie de Guinée et l'autre au-delà des frontières. Ceci se traduit par un va-et-vient entre la colonie de Guinée et, par exemple, la République de Guinée. Ou plutôt se traduisait, car depuis l'indépendance de la République de (iuinée la situation a beaucoup changé. Maintenant les frontières portugaises s'ouvrent difficilement et les gens sont étroitement surveillés. L'avènement de l'indépendance de la République de Guinée a sans aucun doute été un important stimulant pour les mouvements politiques de la (iuinée encore occupée par le Portugal. Il était évident que la République de Guinée ne pourrait pas rester indifférente au sort de ses frères situés de l'autre côté de la fron- 17. Discours publié par le Jornal do Comcrcio tic Louanda, 27 avril 1959. • 1 !
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Title | CENPA-315~07 |
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Full text | n 36 PRESENCE AFRICAINE Guerra, Mingas, Graça, les frères Benge, dont l'un est devenu paralysé et muet à la suite des violences subies dans les cachots. « Ce sont, pour la plupart, des fonctionnaires de l'État. M. Bento Ribeiro, qui fut pendant quelque temps le représentant des populations indigènes au « Conseil du gouvernement », fut également emprisonné, mais bientôt relâché, » Et le correspondant de La Gauche ajoute encore : « Nous voici, en fait, au début du processus qui pourrait mener à l'extermination massive — je pèse mes mots — des populations coloniales : l'intimidation systématique pur voie d'emprisonnement et de brutalités. Cela fmira-t-il aussi par la guerre coloniale? Des Portugais le souhaitent « pour en finir une fois pour toutes avec l'opposition des Africains. » Les événements avaient d'ailleurs déjà justifiés les craintes du correspondant de La Gauche. En effet, le 26 avril dernier, une foule évaluée à 100.000 personnes (colons portugais pour la plupart) massée à l'aéroport de Bêlas, aux alentours de la ville de Louanda, applaudissait le saut du premier parachutiste qui toucha le sol angolais, un certain Révérend Martins, l'aumônier qui accompagnait l'Armée de l'Air depuis Lisbonne. C'était le début des prouesses qui marquèrent l'installation de la forcu de l'Air en Angola. Puis, les bombardements, du tir sur les cibles, des exercices rvthmés par le feu des mitraillettes, enfin des attaques précises avec les bombes au « napalm » de quarante-cinq kilos, complétaient le programme, de cette démonstration militaire qualifiée par le quotidien de Louanda, () Jornal do Comcrcio de « premier Festival de la Force aérienne portugaise ». « Les opérations se déroulaient et se déroulèrent comme sur un champ militaire, écrit encore Im Hanche, les autorités ayant bien fait remarquer qu'il s'agissait là « de la forme de combat qu'elles mèneraient au cas où il faudrait mater une rébellion anticolonialiste », ou mieux encore le jour où elles décideraient d'écraser « en les devançant » les tentatives de rébellion populaire contre le colonialisme. « Agiles, athlétiques, au pas allemand — informe la presse coloniale enthousiaste, — les soldats étonnaient la population européenne. Ft plusieurs observateurs, nous dit-on, ne souhaitaient apparemment qu'une chose : (pie cela ne fût pas seulement un exercice. « D'autres manifestations de ce j;enrc furent organisée» dans les régions du centre et du sud de l'Angola : Nova Lisboa, Sa da Ban- deira, Lobito, Benguela. « Le député colonial du Mozambique à l'Assemblée nationale portugaise réclamait à son compte l'installation des forces militaires (aériennes) dans cette « province » « de la cê>te orientale ». PORTUGAL ET COLONIES D'ANGOLA ET GUINEE 37 Le soir même du 26 avril, après les démonstrations de la Force aérienne et au cours 'U\ banquet offert au sous-secrétaire d'État à l'Aéronautique portugaise, le gouverneur général de l'Angola prononça un discours dans lequel il déclara : « De nos jours la paix n'est possible (pie du moment où les F.iats disposent de forces suffisantes pour faire face aux menaces des agitateurs et des perturbateurs, inspirés généralement par le communisme, et sous des formes plus voilées. Le pays ne pourra se défendre s'il ne dispose pas d'une armature militaire. Partout où il existe un coin de terre portugaise, il faut que les troupes de terre, de mer et de l'air soient présentes et vigilantes, afin d'empêcher qu'on ne cède aux convoitises ou aux fausses idées. Ft plus encore : il faut que ces troupes soient moralement fortes pour résister aux diverses propagandes qui prétendent les miner, puisque l'on sait que l'armée est le principal obstacle à la diffusion de la propagande. Nous sommes à l'époque des tracts... dans lesquels la force militaire est considérée comme un ennemi gênant. Car, comme on s'y attendait, le tract est apparu aussi en Angola17. » Ce fut cette même décision générale de réprimer avec violence les moindres revendications des populations africaines qui fit de la colonie de Guinée le théâtre d'événements sanglants. Il n'est peut-être pas inutile de rappeler (pie le territoire de Guinée, (pii compte à peu près 600.000 habitants, partage ses frontières du nord avec le Sénégal, que la République de Guinée couvre toutes ses frontières de l'est et du sud; et qu'à l'ouest ses côtes sont baignées par l'Atlantique. La colonie de Guinée est un des cas typiques de morcellements coloniaux réalisés sans l'avis des populations locales. De part et d'autre de la frontière l'on retrouve des populations pariant la même langue, des ensembles appartenant au même groupe ethnique (Fulas, Mandings, Manjocas), etc. Ainsi l'on voit souvent des familles dont une partie se trouve dans la colonie de Guinée et l'autre au-delà des frontières. Ceci se traduit par un va-et-vient entre la colonie de Guinée et, par exemple, la République de Guinée. Ou plutôt se traduisait, car depuis l'indépendance de la République de (iuinée la situation a beaucoup changé. Maintenant les frontières portugaises s'ouvrent difficilement et les gens sont étroitement surveillés. L'avènement de l'indépendance de la République de Guinée a sans aucun doute été un important stimulant pour les mouvements politiques de la (iuinée encore occupée par le Portugal. Il était évident que la République de Guinée ne pourrait pas rester indifférente au sort de ses frères situés de l'autre côté de la fron- 17. Discours publié par le Jornal do Comcrcio tic Louanda, 27 avril 1959. • 1 ! |
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